dimanche 15 février 2009

Bedtime stories


"Quand tu es couché, es-tu conscient qu'au-dessus de toi des étoiles disposées au hasard contemplent l'univers ?"
Werner Herzog dit ça dans Fata Morgana. Tex Avery, lui, dit autre chose à travers une cascade de courses poursuites hystérico-libidinales by night. On admirera entre autres le transport rétractable limousine/smart du grand méchant loup.


samedi 14 février 2009

"Les pirates de la route"


Voilà comment une traduction française ruine le mystère d'un titre. Je m'imaginais acheter un billet pour "they drive by night", sentiment de noirceur, d'aventure, qui sont ces "they"? Qui est cette femme en rouge, nimbée de bleu? Qui partage le volant avec Humphrey, la main nonchalament, négligement posée sur son épaule? Tant de questions que le prosaïsme français massacre avec un plat "Les pirates de la route" et ses camions qui semblent défiler en boucle!!!

Il sera donc toujours question de voiture ou de tout autre engin qui permet de se déplacer la nuit! Train, moto, side-car, pieds et mocassins, la liste est longue!

On commence avec l'immense Marty, qui se livre à un chouette cameo dans le bien nommé Taxi Driver. Barbu et agressif, il monte à l'arrière du yellow cab de Travis Bickle pour un angoissant face à face, ou plutôt ici un "dos à dos". Scorsese joue un psychopate prêt à tuer l'amant de sa femme et balance un mémorable: "I bet you must think I'm pretty sick". A noter, de Niro ne dit rien à part un "Yeah" de circonstances, la musique et ses yeux parlent pour lui.



Ces dans ces moments là que mon euphorie Youtube prend des proportions extravagantes! A la minute où j'écris je viens de regarder la série de storyboards associés à chaque grande scène du film, présentés de manière ultra didactique et sobre à la fois!



Sans transition et dans la série "improbable" je demande Winona Ryder en chauffeuse de taxi à casquette à l'envers, cheveux gras et mâcheuse de chewing gum! Mais surtout, c'est le duo qu'elle forme avec GENA- meilleure actrice du monde- Rowlands qui takes my breath away. On passera sur le dialogue qui ne passionnera pas les foules, et qui me fait humblement me demander si la réputation de Jarmusch n'est pas un brin usurpée sur les films à sketch! Dans le genre concentrons nous sur l'anecdotique, on appréciera particulièrement le tailleur black & white de Gena, inspiration pour les prochains cocktails de Roselyne Bachelot! Sinon, en tant que martyphile, je me demande si la blague est pas un peu appuyé niveau hommage... Vers 4min, l'insert clope à l'oreille dans le rétro m'enchante, et la musique aussi! Sinon, ne pas hésiter à passer l'extrait en accéléré...



Ah, mais qui dit voiture et nuit, invite inévitablement à envoyer un extrait de Mulholland Drive! J'ai opté pour a "secret path" parce qu'à ce moment précis du film les nerfs du spectateur qui découvre le film pour la première fois sont totalement mis à l'épreuve, et ceci, contrairement à la sublime ouverture du film version Laura Harding, où on est juste en train de s'acclimater à l'ambiance. Les deux sont orchestrées par l'auguste Badalamenti.


Enfin, pour terminer, je propose en boutade cette scène d'Annie Hall qui fait ma joie, où Christopher Walken aka Dwaine se confie à Alvy Singer (Woody Allen ) et lui raconte ses angoisses sur la route la nuit. Le payoff est juste parfait!!! Ah si Woody pouvait ressusciter son inspiration late 70's!

"they drive by night"

Je voulais faire une intro choc en lançant deux paroles de chanson, comme ça, sorties de nulle part: "Funny how secrets travel" et "I'm deranged, down, down, down, so cruise me babe, cruise me baby". Histoire de ne pas faire de faux amis, ou de se pencher sur les implications plus ou moins délirantes du nom d'un certain Tom, je tiens à rappeler la définition première de "cruise":
1. to sail about from place to place for pleasure
2. (of a vehicle, aircraft, or ship) to travel at a moderate and efficient speed.

Du coup, ces paroles de David Bowie (eheheh fallait bien révéler mes sources au bout d'un moment), associées au générique et à la ligne de fuite du Lost Highway de David Lynch, donnent une bonne idée des possibles envolées nocturnes sur macadam.

Sauf que, si on se souvient du film faussement scandaleux de Willian- l'exorciste- Friedkin, "cruising", sur les bas-fond de la nuit SM-gay new yorkaise, on commence à se dire qu'y a cruiser et cruiser... Et on n'aura pas tort!
b. Slang To look for a sexual partner, as in a public place.



Bref, après cette brève parenthèse pacinesque, voilà mes point de départ pour une exploration "on the road" de voyages crépusculaires.


Je triche un peu avec "La nuit du chasseur" puisque les enfants se déplacent en bateau, mais la scène est tellement sublime que je m'accorde cette entorse!!!!!!!
Le trajet est peut être encore plus beau si l'on se contente d'écouter la BO et de regarder ces images oniriques séparément. Jamais marécages ne m'auront paru aussi cinégéniques. Je maudis le montage parrallèle qui nous ramène dans l'antre des voisins à 2 minutes 52!!! Le retour de cet univers nocturne se fait à 4min30 avec l'apparition opportune d'une chouette et son sombre hululement! Les oreilles des lapins frissonnantes, l'avancée calme et lente de la tortue, les fragiles secousses des saules pleureurs, tout concourt à donner à cette odyssée une allure de conte de fée morbide.



Comme je suis relativement obsessionnelle et que je voulais retrouver les paroles de la lullaby/ berceuse, par une voie détournée je suis carrément tombée sur le script officiel. Voilà comment Charles Laughton, James Gurbb et un 3ème larron dont le nom m'échappe ont décrit cette séquence: (dommage que la typo screenplay ne soit pas respectée)

LONG SHOT -- THE RIVER AND LANDSCAPE Featuring starlight; and
the drifting boat -- PEARL in stern.
TWO-SHOT -- THE CHILDREN -- FRONT ON JOHN is asleep. PEARL
sits sleepily whispering to her doll.
PEARL
Once upon a time there was a pretty fly,
and he had a wife, this pretty fly...
MEDIUM LONG SHOT -- THE DRIFTING BOAT, THROUGH FIREFLIES
PEARL'S VOICE (o.s.)
...and one day she flew away, and then one
night his two pretty fly children...
SPECIAL SHOT -- THE MOVING SKIFF, THROUGH DEW-JEWELED SPIDERWEB
PEARL'S VOICE (o.s.)
...flew away too, into the sky, into the moon...
SPECIAL SHOT -- A FROG, AND SKIFF A big frog is profiled; the
skiff drifts by in distance; the frog twangs out a bass note.










Puis, deuxième partie:
CLOSE SHOT -- A HOOT OWL ... hooting.
LAP DISSOLVE TO
CLOSE SHOT -- A TURTLE -- NOONDAY He comes down to water.
JOHN'S VOICE (o.s.)
They make soup out of them...
LONG SHOT -- THE CHILDREN IN PASSING SKIFF Full landscape in
BACKGROUND.
JOHN
(continuing)
... but I wouldn't know how to go about
gettin' him open.
LAP DISSOLVE TO
LONG SHOT -- CHILDREN AND SKIFF, OVER RABBITS IN GRASS We shoot
over two sitting rabbits as they watch, their ears up. The
skiff passes. PEARL plays with doll; JOHN unsnarls line.
LAP DISSOLVE TO
FULL SHOT -- THE CHILDREN AND SKIFF, FRAMED BY WILLOWS --
TWILIGHT The skiff passes. Baa-ing of sheep o.s.
MOVING SHOT -- FROM RIVER -- A SHEEP The sheep bleats. We PAN
in a big barn near the river, then a lighted house; willows
along shore.
FULL SHOT -- THE SKIFF -- FROM THE BANK JOHN re-sets his oar.
They angle towards us for the shore.
JOHN
We're gonna spend a night on land.
UP-SHOT -- THE CHILDREN, OVER THE MOORED SKIFF ... they reach
top of the bank. Corner of barn and lighted window in
BACKGROUND. Sounds of mouth-organ and girl singing o.s.

Du coup comme je me fais du stream of consciousness toute seule, je propose immédiatement un extrait de Blanche neige de Disney, perdue la nuit dans la forêt, que je crois très sincèrement ne pas avoir revu depuis mon enfance calée dans un fauteuil rouge d'un cinéma des Champs. Je devais avoir... ah rapide check up sur le net pour voir l'année de resortie... 4 ans?
Cette scène m'avait évidemment profondément marquée, mais en la revoyant là, je suis presque encore plus subjuguée par les différents registres de peur explorés!


Pour changer de registre et revenir à l'aspect plus nocturne et automobile du post, je balance 48 secondes plutôt directes de Crash, mais qui n'éclaireront pas forcément les spectateurs non initiés aux jeux sexuello-macabres d'Holly Hunter et James Spader.


"In Crash I would openly propose a strong connection between sexuality and the car crash, a fusion largely driven by the cult of celebrity. It seemed obvious that the deaths of famous people in car crashes resonated far more deeply than their deaths in plane crashes or hotel fires. "

Et pour ceux qui ont toujours rêvé de voir Rosanna Arquette armées de jambes/ prothèses de cuir/ plastique noires enlacer Holly Hunter dans une décapotable, sous fond de Howard Shore, on remercie instantanément Youtube et le lubrique Cronenberg!



Je termine ce post par un immense regret. J'aurais vraiment y ajouter la scène charnière du dernier acte de "A history of violence" où Tom Stall "devient" Joey. Il part en pleine nuit, prend sa voiture, et sur ce trajet "intérieur" de Millbrook, Indiana à Philly, il reprend imperceptiblement, petit à petit, l'identité du mob guy. Fabuleux passage.
Frustrée, j'appose donc la fin, magistrale, mais qui peut sembler un peu mièvre et grandiloquante si on a pas vu tout le film. Et, du coup, là, c'est le trajet inverse, retour à sa "vraie" vie. A chaque fois je craque! Et pas une parole!
Désolée pour les bandes grises et la légère pixellisation, ça donne pas envie d'aimer le streaming!