samedi 14 février 2009

"they drive by night"

Je voulais faire une intro choc en lançant deux paroles de chanson, comme ça, sorties de nulle part: "Funny how secrets travel" et "I'm deranged, down, down, down, so cruise me babe, cruise me baby". Histoire de ne pas faire de faux amis, ou de se pencher sur les implications plus ou moins délirantes du nom d'un certain Tom, je tiens à rappeler la définition première de "cruise":
1. to sail about from place to place for pleasure
2. (of a vehicle, aircraft, or ship) to travel at a moderate and efficient speed.

Du coup, ces paroles de David Bowie (eheheh fallait bien révéler mes sources au bout d'un moment), associées au générique et à la ligne de fuite du Lost Highway de David Lynch, donnent une bonne idée des possibles envolées nocturnes sur macadam.

Sauf que, si on se souvient du film faussement scandaleux de Willian- l'exorciste- Friedkin, "cruising", sur les bas-fond de la nuit SM-gay new yorkaise, on commence à se dire qu'y a cruiser et cruiser... Et on n'aura pas tort!
b. Slang To look for a sexual partner, as in a public place.



Bref, après cette brève parenthèse pacinesque, voilà mes point de départ pour une exploration "on the road" de voyages crépusculaires.


Je triche un peu avec "La nuit du chasseur" puisque les enfants se déplacent en bateau, mais la scène est tellement sublime que je m'accorde cette entorse!!!!!!!
Le trajet est peut être encore plus beau si l'on se contente d'écouter la BO et de regarder ces images oniriques séparément. Jamais marécages ne m'auront paru aussi cinégéniques. Je maudis le montage parrallèle qui nous ramène dans l'antre des voisins à 2 minutes 52!!! Le retour de cet univers nocturne se fait à 4min30 avec l'apparition opportune d'une chouette et son sombre hululement! Les oreilles des lapins frissonnantes, l'avancée calme et lente de la tortue, les fragiles secousses des saules pleureurs, tout concourt à donner à cette odyssée une allure de conte de fée morbide.



Comme je suis relativement obsessionnelle et que je voulais retrouver les paroles de la lullaby/ berceuse, par une voie détournée je suis carrément tombée sur le script officiel. Voilà comment Charles Laughton, James Gurbb et un 3ème larron dont le nom m'échappe ont décrit cette séquence: (dommage que la typo screenplay ne soit pas respectée)

LONG SHOT -- THE RIVER AND LANDSCAPE Featuring starlight; and
the drifting boat -- PEARL in stern.
TWO-SHOT -- THE CHILDREN -- FRONT ON JOHN is asleep. PEARL
sits sleepily whispering to her doll.
PEARL
Once upon a time there was a pretty fly,
and he had a wife, this pretty fly...
MEDIUM LONG SHOT -- THE DRIFTING BOAT, THROUGH FIREFLIES
PEARL'S VOICE (o.s.)
...and one day she flew away, and then one
night his two pretty fly children...
SPECIAL SHOT -- THE MOVING SKIFF, THROUGH DEW-JEWELED SPIDERWEB
PEARL'S VOICE (o.s.)
...flew away too, into the sky, into the moon...
SPECIAL SHOT -- A FROG, AND SKIFF A big frog is profiled; the
skiff drifts by in distance; the frog twangs out a bass note.










Puis, deuxième partie:
CLOSE SHOT -- A HOOT OWL ... hooting.
LAP DISSOLVE TO
CLOSE SHOT -- A TURTLE -- NOONDAY He comes down to water.
JOHN'S VOICE (o.s.)
They make soup out of them...
LONG SHOT -- THE CHILDREN IN PASSING SKIFF Full landscape in
BACKGROUND.
JOHN
(continuing)
... but I wouldn't know how to go about
gettin' him open.
LAP DISSOLVE TO
LONG SHOT -- CHILDREN AND SKIFF, OVER RABBITS IN GRASS We shoot
over two sitting rabbits as they watch, their ears up. The
skiff passes. PEARL plays with doll; JOHN unsnarls line.
LAP DISSOLVE TO
FULL SHOT -- THE CHILDREN AND SKIFF, FRAMED BY WILLOWS --
TWILIGHT The skiff passes. Baa-ing of sheep o.s.
MOVING SHOT -- FROM RIVER -- A SHEEP The sheep bleats. We PAN
in a big barn near the river, then a lighted house; willows
along shore.
FULL SHOT -- THE SKIFF -- FROM THE BANK JOHN re-sets his oar.
They angle towards us for the shore.
JOHN
We're gonna spend a night on land.
UP-SHOT -- THE CHILDREN, OVER THE MOORED SKIFF ... they reach
top of the bank. Corner of barn and lighted window in
BACKGROUND. Sounds of mouth-organ and girl singing o.s.

Du coup comme je me fais du stream of consciousness toute seule, je propose immédiatement un extrait de Blanche neige de Disney, perdue la nuit dans la forêt, que je crois très sincèrement ne pas avoir revu depuis mon enfance calée dans un fauteuil rouge d'un cinéma des Champs. Je devais avoir... ah rapide check up sur le net pour voir l'année de resortie... 4 ans?
Cette scène m'avait évidemment profondément marquée, mais en la revoyant là, je suis presque encore plus subjuguée par les différents registres de peur explorés!


Pour changer de registre et revenir à l'aspect plus nocturne et automobile du post, je balance 48 secondes plutôt directes de Crash, mais qui n'éclaireront pas forcément les spectateurs non initiés aux jeux sexuello-macabres d'Holly Hunter et James Spader.


"In Crash I would openly propose a strong connection between sexuality and the car crash, a fusion largely driven by the cult of celebrity. It seemed obvious that the deaths of famous people in car crashes resonated far more deeply than their deaths in plane crashes or hotel fires. "

Et pour ceux qui ont toujours rêvé de voir Rosanna Arquette armées de jambes/ prothèses de cuir/ plastique noires enlacer Holly Hunter dans une décapotable, sous fond de Howard Shore, on remercie instantanément Youtube et le lubrique Cronenberg!



Je termine ce post par un immense regret. J'aurais vraiment y ajouter la scène charnière du dernier acte de "A history of violence" où Tom Stall "devient" Joey. Il part en pleine nuit, prend sa voiture, et sur ce trajet "intérieur" de Millbrook, Indiana à Philly, il reprend imperceptiblement, petit à petit, l'identité du mob guy. Fabuleux passage.
Frustrée, j'appose donc la fin, magistrale, mais qui peut sembler un peu mièvre et grandiloquante si on a pas vu tout le film. Et, du coup, là, c'est le trajet inverse, retour à sa "vraie" vie. A chaque fois je craque! Et pas une parole!
Désolée pour les bandes grises et la légère pixellisation, ça donne pas envie d'aimer le streaming!


1 commentaire:

Mirlaine a dit…

génial ce post!!!! la nuit au cinéma c'est un peu une blague perpétuelle : soit on la représente comme une épaisse nuée toute noire d'où surgissent parfois des yeux tout blancs, soit comme un prétexte à ambiance de pleine lune au bord de la surexposition. Cela dit sous mon sarcasme je trouve la photo de la Nuit du Chasseur subliminale. ça m'évoque The Innocents de Clayton (1961!), peut être à cause des enfants. Regarde le générique, en plus d'être assez éthérique et bien nocturne, il est plutôt racé : http://www.youtube.com/watch?v=IPUKQ_ejjp0